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La double peine

je suis un salarié du service public de la radio à Toulouse. J’y suis reporter depuis 26 ans déjà. J’aime mon métier que j’ai toujours fait avec passion et enthousiasme. J’ai, ce qu’on appelle, du caractère, de la personnalité. Je demande, y compris à mes employeurs,  à être convaincu rationnellement plutôt qu’à être dominé hiérarchiquement. La hiérarchie est, à mes yeux, fonctionnelle, factuelle, elle n’est pas le constat d’une supériorité ou d’une infériorité.

C’est pourquoi, en Juillet 2007, j’ai « pété les plombs ». En un mot, j’ai insulté par écrit mon employeur et j’ai ironisé sur sa gestion du personnnel en évoquant le cas d’un confrère qui obtenait une mutation dans mon bureau en dehors de tout respect des régles de fonctionnement de la maison. C’est à dire en dehors de toute consultation définissant le profil du poste, permettant à tous les candidats de postuler, dans l’espoir équitable d’être éventuellement choisi.

Pour ces insultes, j’ai été puni de plusieurs manières. Tout d’abord, j’ai failli perdre mon emploi. Failli seulement car au dernier moment, la direction y a renoncé devant ma propre situation de santé. Le médecin de la Médecine du travail et mon psychiatre ont fait le constat d’un état dépressif qualifié de « burn out ». Ensuite, cela m’a valu deux séjours en maison de repos, une tentative de suicide, et quinze mois d’arrêt de travail.

Il y a 5 mois et demi, j’ai enfin repris le travail à mi temps thérapeutique et je devais enfin repasser à plein temps. Mais voici que j’ai rechuté.

Ma direction, après avoir échoué à me muter d’autorité grâce la mobilisation syndicale et au fait que  la mutation ne fait pas partie de la convention collective nationale des journalistes, remet des pièces dans la machine. Prenant prétexte de ce que je n’ai aucune relation amicale ou inamicale avec le confrère sur lequel j’avais ironisé, elle veut me muter impérativement d’ici le 1 er juin prochain dans des villes dont certaines n’ont aucune radio de Radio France.

Je vis cette situation comme un harcélement puisque je n’ai commis aucune nouvelle faute et que l’on veut, sur la base de ouïr dire, me muter, sans que je sois entendu sur l’éventuelle nouvelle faute, ni qu’aucun conseil de discipline n ‘ai été convoqué.

Ma direction n’a manifestement qu’un objectif: me licencier ou me déplacer, sans tenir compte de ma situation psychologique – je suis toujours en traiment médical – ni de ma situation familiale – me punir par un éloignement, c’est contraindre ma femme a perdre son emploi ou mettre mon couple en difficulté.

Le harcélement est, à mes yeux avérés, par les courriers et les injonctions, sans explications de ma direction, qui me considére comme un objet qu’on peut déplacer. Mon avocat doit porter l’affaire devant la justice prud’hommale, forcément longue et lente. De plus, gagner juridiquement ne siginfie pas gagner concrétement. Une fois qu’on est dehors, la réintégration est souvent une fiction.

Ne pouvant plus supporter cette situation, j’ai donc décidé d’une action de grève de la faim devant les locaux de mon entreprise à Toulouse à compter du 4 mai 2009

Mon objectif est simple: obtenir la fin de ce harcélement, obtenir une lettre qui abandonne toute mutation injustifiée, obtenir de ma direction un dialogue direct.

De vous, lecteurs, je réclame donc un soutien moral. Je ne cherche pas seulement une éventuelle compassion, une empathie, je sollicite l’esprit de justice par les messages que vous voudrez bien me laisser.

 

 

26 avril, 2009 à 16:18 | Commentaires (6) | Permalien


Il faut souffrir pour être (re)belle

C’est devenu un lieu commun. Désormais, au travail, on souffre ! La préoccupation a longtemps était individuelle. Celui qui souffrait était en quelque sorte inadapté à son travail, voire incompétent, d’où sa fragilité. Mais, ce n’est plus le cas. La souffrance au travail est devenu un sujet de préoccupation des Comités d’hygiène et de sécurité au travail. Une question collective que l’on traite principalement de deux manières convergentes.  Une manière technique et psychologique. Les réponses proposées au mal être sont ainsi des solutions ergonomiques pour adapter le poste de travail au salarié et des réponses psychiques. Par exemple, dans certaines entreprises, le salarié peut officiellement se faire masser pour évacuer le stress, où en parler avec l’assistante sociale de l’entreprise. Certains salariés y ajoutent une réponse personnelle. Multiplier les pauses cigarettes pour échapper à l’emprise du travail. En fait, on traite le mal, en occultant ce que revéle cette souffrance, un mode d’organisation du travail et de production qui la contient et l’alimente.

Ainsi la création des espaces ouverts – les open spaces –  a t’elle amplifié le mal être. Cette pratique en dit long sur l’idéologie productiviste qui est derrière. Il ne s’agit pas, en effet, seulement de faire des économies de bureaux en le faisant disparaitre. Elle proclame clairement que l’intime, le personnel, l’individuel n’a pas lieu d’être sur le lieu de travail, espace collectif par essence. Chacun, devant son ordinateur, visible de tous, n’est pas seulement l’égal de chacun, il est d’abord son concurrent et son superviseur, puisque rien de ce que je fais, dans mon coin, ne peut lui échapper. Impossible dans ces conditions, d’avoir un « chez soi » chez les autres. Impossible d’échapper à la comparaison permanente, à l’évaluation du tous contre tous, au jugement des apparences.

Ainsi, dans une rédaction, il faut toujours avoir l’air occupé, même quand de fait, on n’a rien à faire. Le travail d’un journaliste n’est pas de produire des articles en série, dont à la fin de la journée, on puisse quantifier le volume pour justifier son salaire. Il y a des temps morts et des temps forts, du temps  »libre » et des temps contraints puisque c’est le rythme de l’information qui crée le tempo de la production. Bien sûr, on passe du temps à s’y préparer, puisque pour aborder un événement, il faut une culture de l’instant et des situations, ce qui passe par la lecture des journaux, des magazines, des sites internets, des archives parfois, et des coups de téléphone pour s’assurer un lien avec les événements et ses acteurs, avoir une connaissance du terrain.  Dans la mienne – à Toulouse – il faut en plus une hyper réactivité pour illustrer nationalement le sujet du jour, ou des idées pour se frayer une place sur l’antenne, et exister professionnellement. Car en effet, il y a un manque évident de structuration. Pas de conférence de rédaction locale pour déterminer les sujets du jour, pas de répartition du travail, pas de « responsable local », tous sont à paris et c’est téléphoniquement que tout se négocie. Du coup, c’est à qui décrochera le premier le téléphone pour avoir son sujet ou pour proposer une idée. Cela crée inévitablement une certaine tension, notamment quand, par manque de concertation, on ignore si le sujet qu’on envisage n’a pas déjà été proposé par un confrère qui, absent de son bureau, est justement sur le terrain en train de le faire. A l’inverse, préempter un bon sujet  peut nourrir les inimitiés puisque c’est ainsi qu’on se reserve le plus exaltant au détriment d’un sujet plus quelconque. Avec le temps, la répétition, on peut même se donner l’illusion d’être devenu, de fait, le spécialiste de la question.

Naturellement, tout est dans le non dit. Personne ne reproche rien à personne puisque cela fonctionne à peu prés, mais la chose transpire, le stress s’insinue, et une colère finit parfois par s’exprimer. C’est à ces moments là que la rédaction affirme qu’elle n’est pas une communauté d’intérêts partagés mais une juxtaposition d’individualités, concurrents de fait. Ce qui est, en soi, idiot puisque tout le monde travaille pour les mêmes antennes. Mais c’est ainsi, dans ce métier qui carbure aussi à l’égo. Un papier sur france info, vous êtes un pro. Rien depuis deux jours, vous n’existez plus. j’exagère un peu, mais ca vous rend accro et productiviste. Aussi, quand l’actualité n’a pas de talents pour vous fournir les bons sujets, et que l’imagination pour en trouver vous fait défaut, tout comme l’accro, vous ressentez le manque. Si cela dure, il peut même vous arriver d’aller au travail à reculons. Car le temps contraint n’est plus celui de la production, mais le temps que vous passez à attendre la bonne opportunité, un temps hémophile.

La souffrance est certes sans douleur. Le salarié perçoit, qu’il produise ou pas – ce sont les contraintes du métier – son salaire. Mais le mal, qui varie d’un individu à l’autre, est bien là. Surtout pour qui se vit comme un outil lequel doit impérativement servir, se dépenser. Sur certains, tout cela glisse comme la pluie sur une vitre. Sur d’autres, comme moi, cela conduit, tout comme l’hyper activité à l’implosion.

 

 

 

 

30 avril, 2009 à 13:29 | Commentaires (1) | Permalien


Le gréviste (vidéo)

Le gréviste (vidéo) wma legréviste

29 avril, 2009 à 20:13 | Commentaires (0) | Permalien


De la difficulté de sortir du conflit

le conflit, ca fait partie de la vie, mais parfois aussi, ça la pourrit. Car le conflit est également une machine infernale qui, une fois lancée, à du mal à s’arrêter: question d’honneur, de principe, de logique, de personnalités, tout autant que problème de fond. Tout salarié menacé dans son emploi de cette manière a connu ou connaitra ce genre de situations.

Au fond, mon problème a des solutions, des sorties par le haut et par le bas. Tout dépend évidemment pour qui. Voyons cela des deux points de vues forcément entremêlés. La sortie par le bas. Elle est simple, carrée et rapide. Content ou pas, je négocie financièrement mon départ. Certains l’ont fait, pourquoi pas moi ? Content ou pas, j’accepte la mutation injustifiée. Je renonce ainsi de fait à mon avocat, mon procès pour harcélement, mes droits et devenu soumis, je fais désormais où on me dit de faire. la question de principe, c’est la justice ? Pour payer pour une faute que l’on a pas commise. Légal ou pas, moral ou pas, dois je plier simplement parce que la direction m’a pris en grippe ?

Ce que j’y gagne, tout d’abord la tranquillité. Fini la peur du facteur et de ses lettres recommandées, la crainte d’un nouvel impair préjudiciable, le risque de chômer. Au pire, dans une nouvelle affectation, je risque de m’ennuyer, de devenir amer, de déprimer un peu plus, de me démotiver. Mais la motivation n’est pas la qualité première requise pour aller au travail. En 26 ans, je n’ai jamais vu personne être importuné pour la faiblesse de son travail. Cela n’a même aucune incidence sur son evolution pécuniaire ou statutaire dans les négociations paritaires qui ont lieu chaque année.  le seul critère objectif, c’est l’ancienneté dans la maison. Non, ce que la direction souhaite, c’est qu’on ne lui résiste pas, qu’on ne fasse pas de vagues. C’est ce qu’elle obtiendrait dans cette sortie par le bas. Elle en fait même un point d’honneur. La DRH dit ainsi clairement à mon syndicat que puisque j’ai pris un avocat – ce qui est mon droit – on n’a rien à se dire.  Le principe, c’est que le chef doit toujours gagner, donc être inflexible, quitte à ne pas être droit.

La sortie par le haut du salarié est toujours un peu plus complexe puisque dans un conflit, il doit y avoir un vainqueur et un vaincu. C’est même le principe de tout combat. Les plus mauvais, sont ceux dont le public se dit, c’est un match nul. Seule donc la victoire de la direction peut être proclamé, soit qu’elle ait vaincu, soit qu’elle se montre magnagnime et tienne à le faire savoir pour l’exemple. Au terme d’un accord, si le salarié gagne, il doit se taire. Il ne faut pas ajouter à la victoire, l’humiliation de la défaite.

Cette sortie par le haut part donc de l’hypothèse que je reste à mon poste à Toulouse. Si ma présence physique indispose mon confrère, il y a une réponse technologique. Mon « chez moi » peut devenir mon bureau. Il suffit pour cela d’y installer une ligne numéris, un oridanteur avec logiciel de montage, internet, de me confier un matériel d’enregistrement, une auto de fonction, et je pourrais ainsi assumer mon travail sans importuner personne. Paris jugera de la même manière la pertinence de mes propositions de reportage que si j’étais installé au bureau.

Tous les moyens évoqués ne sont pas un investissement supplémentaire. Aujourd’hui, j’ai déjà besoin de tout ça pour travailler. Plusieurs confrères toulousains – RMC,RTL,Europe1 -travaillent ainsi depuis chez eux. Leur employeur y gagne le loyer d’une location, sans que la visibilité du média ait à en subir une conséquence. L’auditeur écoute une fréquence, pas un local. Le fait que ma direction n’ait pas envisagé cette possibilité montre que dans son horizon indépassable, il y a qu’un impératif catégorique, me remercier ou me déplacer.

Elle y gagnerait pourtant la paix qu’elle réclame. Elle ne me destabiliserait pas psychologiquement, ce qui est aussi un risque pour elle, l’employeur devant assurer à ses salariés les conditions de leur sécurité. Et sans que personne ne perde la face, elle reglerait le problème.

Il resterait cependant un effort qui parait insurmontable. Il lui faudrait m’écrire une lettre pour renoncer à sa mutation injustifiée, autrement dit, reconnaitre ses tords, tandis que je renoncerais sans problème à ma plainte pour harcélement.

Enfin, il y a une solution plus délicate moralement. Me laisser à Toulouse et me dispenser de travail, ce qu’on appelle un placard. Il faut oser le mot puisque même si on ne le dit pas, cela se fait, cela se sait, certaines fonctions officielles ne sont que des caches sexes.

Autrement dit, pour sortir d’un conflit, par le haut ou par le bas, il faut d’abord choisir de ne pas se mentir – à soi tout d’abord, et aux autres ensuite – et savoir où se situe l’essentiel pour soi et pour l’entreprise qui vous emploie.

28 avril, 2009 à 12:07 | Commentaires (0) | Permalien


l’épée de Damoclès

Je ne fais pas une grève de la faim pour faire mon intéressant, ni pour que l’on pleure sur moi. Je sais le danger ou le ridicule que cela représente. Le danger, c’est de mettre en jeu ma santé pour un objectif inatteignable. Le ridicule, c’est de ne pas tenir longtemps, alors précisèment qu’une grève de la faim, c’est fait pour durer. On ne s’intéresse vraiment au grèviste de la faim – surtout les médias - que quand il a perdu du poids. Il faut en quelque sorte prouver sa détermination par un amaigrissement. Il faut aussi qu’il soit significative pour poser question à la société sur le but et les moyens de cette action solitaire. Il faut enfin que celui contre qui il est mené se dise qu’il a plus à perdre qu’à gagner à laisser pourrir la situation. Finalement, c’est perte contre perte.

La grève de la faim est donc un rapport de force. Entre quoi et quoi ? Entre un individu – le gréviste- et un collectif anonyme - l’institution. Dans mon cas, c’est entre moi et une administration qui gère, sans humanité, une situation dont elle prolonge, de mon point de vue, artificiellement, la conflictualité. Depuis le début de mon conflit, elle ne me parle que par lettres avec accusés de réception ou que par avocats interposés, au motif que j’ai moi même un avocat pour défendre mes intérêts, ce qui est la moindre des choses dans un état de droit.  l’administration administre me dira t-on. Elle ne fait que son métier.  Elle gére un dossier, elle s’adresse à un matricule professionnel, elle utilise des procédés réglementaires, elle n’a que faire des affects. La même poutant, m’a accusé, lors d’un conseil de discipline de ne pas  »aimer mes confrères » au motif que j’ai écrit un livre – l’info radio, recto verso aux éditions l’Harmattan- qui émet des critiques.  C’est pourquoi, à mon avis, ceux qui ont cette fonction fonctionne sans problème, ils sont payés pour ça, et dorment sans problème alors que pèse sur moi une véritable épée de Damoclès.

La mutation ou le licenciement. Voici l’alternative. Dans les deux cas, ce qu’on réclame de moi, c’est la soumission de l’objet qu’on déplace. L’administration est dans une logique de tiroir caisse, prête à payer pour ça. Des frais dans un cas, des indemnités dans l’autre. De toute façon, l’argent est celui du service public. Il y a une ligne administrative pour ce genre de situations. Et peut importe qu’après, il n’y ait plus rien, que le chômage, l’absence d’emploi dans mon secteur, l’impossibilité d’une reconversion à 52 ans, les difficultés économiques, familiales, la dépression. Il lui faut avoir raison contre l’individu qui tous les jours s’inquiètent.

Là, le facteur vient de passer dans ma rue. Il n’a pas sonné à ma porte. Aujourd’hui, je n’ai pas de « recommandé » de ma direction. Je suis tranquille pour la journée. Enfin presque, car inévitablement, je rumine, j’imagine des hypothèses de sortie de crise, je tourne en rond dans mon appartement, j’en viens à douter de mes compétences techniques, de la solidité de ma position, je m’intérroge sur les dégats collatéraux pour les miens,  de ce que j’entreprends. Et quand je suis au travail, je me surveille. Surtout, ne pas commettre la moindre erreur. Du coup, j’en commets comme un débutant. Je ne fais plus confiance à mes réflexes professionnels. Par exemple, je perds du temps à peser l’importance réelle d’un événement que j’aurai déjà dû proposer il y a une heure.  je pars donc en retard sur le reportage et une fois sur place, je découvre que j’ai oublié de mettre une carte informatique dans l’appareil d’enregistrement. Ca m’oblige à faire deux fois le déplacement ou à avouer mon erreur à mon rédacteur en chef. Je suis envahi par un stress paralysant qui n’est pas la tension normale d’un professionnel de radio pour qui le temps de production est une donnée clé de la confiance qu’on lui accorde. Son reportage doit en effet être sur l’antenne à l’heure dite. Et le soir, quand je dors, je rêve encore que dans la foule des reporters, je suis nu, sans moyens techniques pour faire mon métier. C’est ça l’épée de Damoclés. L’erreur qui produira la faute qui enclenchera le mécanisme qui me détruira.

Le paradoxe, c’est que  je suis dans une société de communication mais qu’on ne se parle pas, ni ne dialogue. Au mieux, chacun monologue devant l’autre. Au pire, on applique des procédures. C’est ainsi que depuis le début de mon conflit, jamais la direction n’a décroché son téléphone pour me parler d’homme à homme. Légal ou pas, cela serait tout simplement humain. Là, la Direction des ressources humaines mériterait, en partie, son nom. Mais elle gére l’humain comme une ressource, c’est à dire une matière première, une quantité dénombrable, un outil dans un dispositif technique, pas comme une réalité physique, sensible, émotionnelle.

Alors me voilà avec ma grève de la faim pour qu’enfin, on se parle.

27 avril, 2009 à 10:53 | Commentaires (0) | Permalien